Il a un talent hors du commun, un talent qui lui permet de transmettre des émotions par la photographie, notamment par le croisement des regards. Voilà des années qu’il voyage aux quatre coins du monde pour aller à la rencontre de la faune sauvage, notamment dans les régions polaires sur les traces de l’ours blanc. Il peut parler pendant des heures avec passion de ses photos, des anecdotes qui les entourent, des émotions qu’il a ressenties. Lauréat des ZOOMS du Salon de la Photo 2012, son travail est de plus en plus reconnu et sa notoriété grandissante. C’est lors d’une expédition en Arctique que nous l’avons rencontré.
Entretien avec un artiste à la sensibilité touchante, entretien avec notre ami, Kyriakos Kaziras.
Kyriakos Kaziras Ours Polaire 2
Trois expéditions en Alaska, quatre expéditions au Spitzberg, deux expéditions en Sibérie au compteur. Pourquoi les régions polaires t’attirent-elles autant ?
Ce qui me plaît, c’est que quand on est dans ces régions, on a l’impression d’être sur une autre planète. Au Spitzberg, ou au nord de l’Alaska, il n’y pas de civilisation, pas de route. Ce sont des régions tellement sauvages. Il n’y a rien, on se retrouve seul avec la nature.
Kyrakos Kaziras Spitzberg
Ce qui m’attire beaucoup également, ce sont les lumières. Elles sont magnifiques. Ce sont des lumières qu’on ne voit nulle part ailleurs. En Arctique, il fait jour 24 heures sur 24 pendant trois mois. Le soleil tourne autour de l’horizon sans jamais se coucher. Lorsque le soleil touche l’horizon pour la première fois, cela crée des lumières encore plus étonnantes, fantastiques. À chaque expédition dans ces endroits, je vis des moments magiques.
Je vais aussi dans ces régions car j’aime photographier les ours polaires. Je vais en Alaska aux endroits où je sais que je suis susceptible de voir des ours.
Quelle a été l’expédition la plus difficile ?
En 2011, une expédition en Alaska dans le parc national et réserve de Katmai. Il a plu pendant toute l’expé. Et il faisait très froid, même sous la tente. Je suis tombé dans l’eau le premier jour en traversant une rivière. Mes vêtements sont restés mouillés jusqu’à la fin de l’expé. J’avais froid tout le temps. Cela rendait les tâches quotidiennes compliquées, comme aller aux « toilettes » par exemple ! Se lever la nuit demandait beaucoup de préparation à cause de la pluie, du froid et des grizzlis qui rôdaient autour de la tente ! Je suis rentré en France malade avec beaucoup de fièvre. Ceci étant, c’est avec les erreurs que l’on apprend. Cette année, quand je suis reparti en Alaska, je me suis beaucoup mieux équipé avec du matériel grand froid.
Kyriakos Kaziras-Alaska
Est-ce qu’une photo t’a marqué plus que les autres ?
Non. Toutes les photos ont une histoire. Chaque photo est particulière. Il y en a qui sont plus difficiles à réaliser que d’autres, par exemple cette photo d’un ourson sur un tronc de bois prise en Sibérie orientale, au Kamtchatka, sous une pluie battante.
Kyriakos Kaziras- Ourson Alaska
Avec les animaux sauvages, il faut être très patient. Les photos d’ours blanc ci-dessous ont été prises lors de mon expédition en Alaska au mois d’octobre dernier. À cette époque de l’année, les ours attendent que la banquise se forme pour aller chasser les phoques. Mais la banquise ne s’est jamais formée pendant toute la durée de mon séjour sur place ! Il ne se passait pas grand-chose donc. J’ai passé mes journées à observer les ours qui attendaient allongés. Ils avaient très faim. Ils économisaient leur force. À la toute fin de mon expé, des Inuits ont ramené sur la plage une baleine qu’ils venaient de chasser. Les ours se sont nourris de la carcasse de la tête que les Inuits ne conservent pas.
Kyriakos Kaziras Ours Polaire 3
À partir de là, c’est devenu très intéressant pour moi. Les ours ont commencé à être plus actifs, à courir, etc.
Kyriakos Kaziras Ours Polaire 4
Est-ce que tu as prévu de retourner dans les régions polaires prochainement ?
Oui. En août 2013, je ferai le tour du Spitzberg en bateau afin de photographier les ours polaires sur la banquise au Nord. Puis, je retournerai au Nord de l’Alaska au bord de la mer de Beaufort entre mi-septembre et mi-octobre.
J’ai également pour projet d’aller en Antarctique en 2014. Ce sera ma première expédition là-bas.
Comme tu le sais, nous allons courir le Marathon du Pôle Nord. Nous sommes susceptibles d’y rencontrer des ours polaires. Tu t’es déjà retrouvé à plusieurs reprises à quelques mètres d’ours polaires. Comment as-tu géré la situation ?
Si vous vous retrouvez à pied face à face avec un ours blanc, … bonne chance ! L’ours polaire est le plus grand carnivore terrestre, nous sommes de la nourriture pour eux. À chaque fois que je photographie des ours polaires, je suis sur une barque (comme en mer de Beaufort sur la photo ci-dessous) ou sur un voilier (au Spitzberg par exemple). En Alaska, les ours que j’ai vus venaient de se nourrir d’une baleine. Quand ils viennent de se nourrir, ils sont moins dangereux. Un jeune ourson a quand même essayé de monter sur la barque. Mais c’était uniquement pour jouer, par curiosité.
Kyriakos Kaziras-Polar Bear
Quels sont tes autres projets ?
Je viens de sortir un livre, Animal Emotion. Il est en librairie depuis le 11 décembre. Ce livre est le fruit de six années de travail, d’expéditions à travers le monde. Je n’ai pas voulu faire un reportage qui ne contiendrait que dix photos intéressantes et beaucoup de remplissage. Je voulais réaliser un ouvrage assez complet. Ce qui m’intéresse est de transmettre les émotions que je ressens. C’est pour cela que mon livre s’intitule Animal Emotion.
Je retourne au Kenya le 31 décembre pour une dizaine de jours avec mon ami, Pierre Menès. Je vais lui apprendre la photographie animalière. Une équipe de télévision va nous filmer et faire un reportage sur mon travail pour Canal +.
J’expose les photographies de mon livre à Paris, dans la Galerie Janos, 9 rue Christine, dans le 6ème arrondissement, du 17 janvier au 10 février 2013. Ensuite, j’expose mes photographies d’ours, près de Versailles, à Montfort l’Amaury, dans la Galerie BLIN plus BLIN, du 15 mars au 15 mai 2013.
Je pense que je retournerai deux ou trois fois en Afrique au cours de l’année 2013. Car j’ai un nouveau livre en gestation.
Tu fais également beaucoup de sport, notamment du vélo. Quelles sont les courses cyclistes dont tu as pris le départ ?
J’ai participé à tellement de courses … que je ne parviens pas à me rappeler de toutes !! J’ai couru notamment le Paris-Roubaix, le Paris-Honfleur, l’Ardéchoise, la Poulidor, j’ai fait l’ascension du Mont Ventoux par Bedoin.
Qu’est-ce que tu recherches dans ce type de défis sportifs ?
Je cherche à me surpasser. Quand je relève un défi sportif, je me dis que j’ai réalisé quelque chose que je croyais inaccessible. Je me fixe alors un autre objectif que je considère comme inaccessible et ainsi de suite. Quand on franchit la ligne d’arrivée, on est euphorique à l’idée de se dépasser, d’aller au bout de soi-même.
En ce moment, je fais beaucoup moins de sport. Cela me manque. Malheureusement, je n’ai pas le temps. Au cours des quatre derniers mois, je suis parti au Spitzberg, en Afrique du Sud, en Sibérie Orientale, au Kenya, en Alaska, et le reste du temps, j’ai travaillé sur la préparation de mon livre, j’ai répondu à des interviews pour des magazines de photographie, j’ai animé des conférences pour le Club Photoshop à Nantes, j’ai exposé et animé des conférences au Salon de la Photo, porte de Versailles, à Paris, au festival de la photographie animalière de Montier-en-Der et en Slovénie, et j’ai animé des cours à l’école MJM Design Graphic à Paris.
Kyriakos Kaziras ne se contente pas de capturer des images ; il immortalise des moments uniques qui révèlent la beauté brute de la nature et l’âme des animaux qui l’habitent. À travers son objectif, il nous invite à réfléchir sur notre relation avec la faune et l’environnement, nous rappelant que chaque espèce joue un rôle vital dans l’équilibre de notre écosystème. Son engagement envers la conservation et la sensibilisation à la protection des habitats naturels se ressent dans chaque photographie, faisant de son travail non seulement une exploration esthétique, mais aussi un plaidoyer pour la préservation de notre planète. En partageant ses récits et ses découvertes, Kyriakos espère inspirer d’autres à rejoindre la lutte pour la sauvegarde de ces merveilles naturelles pour les générations futures.
Pour en savoir plus sur le travail de Kyriakos Kaziras, visitez son site web ou son blog.